dimanche 25 février 2024

introduction à la Formation accompagnateurs bénévoles ( voir également notre site www.ligueviesante.com )

  Formation en ligne accompagnateurs bénévoles;   proposées gratuitement à l’occasion du  60e anniversaire de nos formations…  Voir sur notre site;   www.ligueviesante.com

texte marc Klinkhamer.  ( droits d'auteur protégés par la SGDL)

Beaucoup de bénévoles, qui font le choix d’apporter une aide concrète aux personnes en difficultés, décident d’œuvrer dans l’humanitaire, l’aumônerie, etc….

Une question se pose alors :  Quel est la nature des rapports entre la personne « aidante » et la personne « aidée » ?  Est-ce que la « bonne volonté » de la personne aidante suffira à faire le lien entre deux univers distincts, d’un côté une personne qui vit dans un certains « bien-être » psychique, a priori suffisamment disponible pour aider son prochain, et, de l’autre côté, une personne qui vit dans l’inconfort d’un certain mal être, voire au sein d’une véritable souffrance ? 

Pour clarifier leurs motivations, beaucoup de bénévoles, qui, rappelons-le, ne sont pas toujours des professionnels de l’accompagnement, se forment de plus en plus grâce à des outils concrets, permettant à la personne aidée de se sentir pleinement « humaine », sur un pied d’égalité avec la personne qui la soutient et l’accompagne. 

L’écoute active représente le premier outil qui va nous éclairer sur les relations que l’on entretient avec une personne en difficulté : Cette approche permet de laisser de côté nos aprioris relationnels pour comprendre pleinement ce qui est exprimé par un sujet qui vit un épisode difficile de son existence. L’Ecoute active peut être développée en 5 volets principaux :

- Accueillir sans aucune forme de jugement la personne en situation de précarité,

- développer une écoute empathique, ouverte et participative, centrée sur la personne,

- Respecter les opinions, les croyances d’un sujet, même si elles sont différentes des nôtres,

- Être capable de reformuler le vécu d’une personne, sans conseiller, sans sermonner, ou autre tentative d’influence (sauf si le sujet émet lui-même une demande de conseil, par ex…)

- développer une compréhension de la personne qui va au-delà de la définition réductrice d’une situation décrite comme « malheureuse », « précaire » ou autre...

 La communication consciente, bienveillante et non agressante suit un protocole en 4 étapes dont l’efficacité a déjà largement fait ses preuves en milieu scolaire, carcéral, ecclésial, etc…,

 1 : Il s’agit de remplacer nos jugements, parti pris et autre opinions toutes faites pour s’en tenir à l’observation de faits concrets, sans passer par nos systèmes d’interprétations habituels.

2 : Exprimer clairement ses ressentis, ses émotions, sans tentatives d’explications, de justifications  qui fausse l’expression authentique de nos sentiments.

3 ;  formuler ses besoins, en encourageant notre interlocuteur à exprimer les siens.

4 : exprimer une vrai demande, qui ne sera ni une exigence, ni une manœuvre quelconque pour emmener l’autre à  penser comme nous.

Ces 4 étapes bien intégrées, un autre outil de développement relationnel va clarifier le type de relation que j’entretiens avec une personne en difficulté : Il s’agit de  l’ Analyse Transactionnelle, qui va me permettre de bien cerner quelle partie de ma personnalité entre en action au sein d’une relation ce ce type.

les automatismes mis en place quand nous communiquons les uns avec les autres sont majoritairement involontaires, et font appel à des réflexes dont nous n’avons pas pleinement le contrôle. Dans de nombreux domaines, Nous fonctionnons quasiment en « pilotage automatique »… 

Éric Berne, créateur de l’analyse transactionnelle, a proposé une représentation en trois pôles, capable d’interpeller quasiment n’importe quelle personne, quels que soit son appartenance socioculturelle et son niveau d’étude. L’analyse transactionnelle a été créée dans le but d’aider les individus à clarifier leurs rapports humains (leurs «transactions » relationnelles), sans passer par une méthodologie  complexe.

                              Voici les trois pôle, qui représentent les trois états du Moi ;

 

- 1), le moi Parent,                      - 2) le moi Adulte                              - 3) le moi Enfant,

 

           Commençons par développer le premier des trois pôles, celui intitulé l’état « Parent » :

On utilise une majuscule pour spécifier cette instance psychique, qu’il ne faut pas confondre avec le mot « parent », pris dans son sens commun de « personne ayant des enfants ».

Le Parent représente l’ensemble des injonctions parentales que nous portons en nous, ainsi que la somme des valeurs morales que nous avons finalement faites « nôtres » tout le long de notre éducation. Celles qui ont guidées et sculptées notre façon de percevoir le monde, ainsi que la plupart de nos croyances et comportements…

 L’état du Moi Parent est subdivisé en deux parties distinctes : Le Parent Normatif et le Parent Bienveillant.                                     

        Le Parent Normatif : Comme son nom l’indique, c’est la partie de notre psychisme qui a enregistré les normes dans lesquelles nous avons évolués durant notre enfance ; Ce cadre normatif peut être très fluctuant suivant le type de famille, de milieu et de culture dans lequel nous avons grandi ; Voici une liste non exhaustive des caractéristiques données par notre Parent Normatif ;

 

- les valeurs morales - les codes de conduites, - les règles de vie à respecter, - les interdits,

 

 - les échelles de valeurs,- les normes comportementales,- les systèmes de croyances, etc…

Les injonctions suivantes résument les expressions typiques de notre Parent :

- tu dois écouter attentivement tes professeurs,

- il est interdit de faire ça

- la discipline est une nécessité pour vivre en société,

- Il est impératif d’obéir aux consignes, pour la sécurité de tous,

- Le respect de nos valeurs reste une priorité…

 

Nous utilisons cette instance du Moi entre autres pour tenter de combler les besoins suivants : besoins de certitude, de valeurs, de stabilité, de rigueur, de compétence, d’assurance, de règles, etc… 

Le Parent Normatif décline ici les aspects caractéristiques de sa position, ceux qui donne un cadre, des limites, et qui permettent de sécuriser le sujet au niveau de ses valeurs et croyances. Plus ces normes seront cohérentes, sensées, et surtout respectueuses du libre arbitre de l’individu, mieux ce dernier saura se repérer à travers l’existence. Mais si le cadre est trop rigide, écrasant, il risque de monopoliser toute l’énergie psychique du sujet. Au contraire, s’il est absent, inconséquent, l’individu possédera peu de repères pour se diriger dans l’existence. L’équilibre idéal reste donc difficile (voir utopique) à concrétiser :

Quelques petites phrases typiques peuvent donner une idée de ce type de messages Parentaux utilisés dans le cadre du soutien aux personnes en difficulté:  

 

- « Ne restez pas dans les rues du centre ville, c’est dangereux »

- « La discipline est une valeur primordiale quand on est en maraude. »

- « Suivez mes instructions, et tout se passera bien dans le centre d’accueil »

- « Pense toujours à te montrer généreuse avec les personnes en état de précarité. »

- « Respectes bien la consigne ; tu sais qu’Il est interdit de leurs donner de l’alcool, »

- « Mettez ce manteau, avec ce froid, c’est indispensable », etc.. etc…

 

Il va sans dire que les personnes trop fortement imprégnées par cette instance du Moi adoptent parfois une position souvent qualifier de « rigide », en direction des personnes qu’elles soutiennent. En cas, le Parent Normatif peut prendre d’autres aspects :  

 

Le Parent Normatif Contrôlant (ou Parent Critique) :

Abordons maintenant les parties plus « sombres » de notre Parent Normatif :

Il s’agit des abus d’autorité inhérents à cette fonction : l’intimidation, la culpabilisation, la condescendance, la critique, l’emprise, etc… que nous utilisons également pour convaincre les autres du bien fondé de nos valeurs, croyances, et autres opinions qui nous caractérise, et que nous aimerions voir adopter par les autres.

 Les phrases types héritées du Parent Contrôlant (Critique) sont - hélas - tellement nombreuses qu’elles pourraient remplir des pages entières ; Quelques exemples :

 

    - « vos opinions erronées font preuves d’une méconnaissance totale des personnes incarcérées ici »

   - « Ces gens-là sont décidément des ignorants ; ils ne veulent rien entendre.. »

   - « Je vous ai déjà dit que vous n’arriverez à rien si vous continuer à fumer du cannabis… »

  - « Vous ne pourriez pas travailler normalement, au lieu de vivre dans la rue ? »,

- « Décidément, on ne peut pas compter sur toi pour faire une maraude efficace »

- « Je suis convaincu que vous vous tromperez encore de centre d’hébergement, comme d’habitude »

- « Si vous aviez écouté mes conseils, vous n’en seriez pas là,»

- « Tu n’en as pas encore assez, de te comporter d’une façon aussi irresponsable avec l’alcool ? »

 

Le Parent Bienveillant :

 nous allons aborder l’autre aspect Parent de notre Moi ; il s’agit du Parent Bienveillant :

« Rappelle aux fidèles.... Qu'ils ne disent du mal de personne, qu'ils soient pacifiques et bienveillants, et qu'ils fassent continuellement preuve de douceur envers tous les hommes… ».  (Tite 3,2).

 

Appelé également Parent nourricier, il représente les aspects protecteurs, sécurisants, du Parent. C’est lui qui offre les particularités suivantes, indispensables pour accompagner une personne en difficulté :

- la bienveillance, -la capacité d’accueil, - la prise en charge, -l’encouragement, -la sécurité, -l‘indulgence, - la compréhension, etc…

Les injonctions du Parent Bienveillant se reconnaissent aisément. Quelques phrases sont proposées ici, ou l’on perçoit que les caractéristiques de ce Parent se traduisent dans certaines formes de relations « bienveillantes » que les adultes peuvent entretenir entre eux, bien après l’enfance:

 

- « n’oubliez pas que je peux m’occuper de votre réinsertion, si nécessaire »

- « Super, je savais que ça marcherait ! Je suis content que tu puisses enfin être hébergé »

- « tu veux que je te prépare un bon petit-déjeuner, avec un café chaud, comme tu aimes ?

- « « Venez dans mes bras, ne soyez pas si triste, on va trouver une solution, vous verrez. »

-« Pour l’aide alimentaire, on y va ensemble si tu veux, c’est plus cool… ».

- « Quoi qu’il arrive, tu peux compter sur moi après ta mise en liberté ».

- « Vous êtes fatiguée, voulez-vous que je vous accompagne au centre d’accueil ? »

- « Pas de souci, n’en parlons plus, c’est pardonné depuis longtemps ! »

- «N’ai pas peur, ce n’est pas bien grave, je vais arranger ça avec la police municipale ».

- « Je te rassure, l’équipe t’accepte comme tu es, ne t’en fait pas… »

 

Ce type de dynamique parentale est tout à fait positif. La psychologie et les approches de développement personnel insistent sur l’impact de la bienveillance dans notre vie, qui permet entre autres d’harmoniser nos relations humaines, et d’accéder aux prémices de l’empathie.

Au-delà des paroles, l’intonation de la voix, la gestuelle, les expressions du visage, l’attitude corporelle, le partage émotionnel, etc…sont d’une importance majeure.

Cette instance du Moi tente de combler les besoins suivants, principalement en direction des autres: Besoins de partage, d’empathie, de confiance, d’intimité, de pardon, de coopération, de compréhension, de mutualité, de sécurité relationnelle, etc…

 

Néanmoins, le Parent bienveillant possède lui aussi certains aspects dits « négatifs » : 

 

Le Parent Bienveillant Surprotecteur ;

 

  Vous avez peut-être remarqué que certaines phrases mises en exemples pourraient avoir une tendance à surprotéger l‘individu ; Le Parent Bienveillant développe un penchant à anticiper les besoins des autres. Il peut lui aussi présenter des aspects négatifs quand il commence à jouer ce rôle protecteur à l‘excès.: « mère poule », « paternalisme », sont des attributs qu’on lui octroi régulièrement. On nomme cette partie négative du Parent Bienveillant « Parent Sauveteur » ou « Parent (sur)Protecteur ».

Contrairement à d’autres instances, ce Parent sauveteur est parfois plus difficile à déceler, car il agit à priori avec une bonne intention, dont il est d’ailleurs lui-même convaincu, même si on ne lui a rien demandé... Son but inconscient vise souvent à obtenir une certaine forme de reconnaissance, d’estime de soi (quand cette dernière est déficiente), voire de restauration narcissique. De plus, le Surprotecteur peut rechercher la gratitude que lui témoignent les personnes qu’il aide et qui dépendent souvent de ses interventions. Ce qui lui apporte un sentiment de bien-être, de sécurité, et le conforte dans son rôle.

C’est pour toutes ces raisons que nous n’hésitons pas à adopter (même si c’est temporairement) certains automatismes liés à cette position, qui permettent d’exprimer, d’une façon détournée, certains de nos besoins non comblés (besoins de gratitude, de reconnaissance, d’estime de soi, etc…).

 

Le Parent « Sauveteur / surprotecteur » peut paraitre positif au premier abord. La aussi, la nuance se joue parfois sur une intonation de la voix, ou dans la formulation. Au lieu de dire et de faire les choses simplement, le Parent Sauveteur aime à croire qu’il est toujours utile, voir indispensable. Quitte à prendre des attitudes qui desservent finalement son entourage.

 Comme son vis-à-vis le Parent Contrôlant / Critique, notre Parent Surprotecteur a une nette tendance à utiliser certaines formes de manipulations inconscientes :

 

-La directivité, - Certaines formes d’emprise, -la dépréciation, la dévalorisation, -La culpabilisation, le besoin de contrôler « en douceur » le vécu d’autrui, vouloir étouffer l’initiative chez les autres,   etc…

 

Quelques exemples de phrases typiques que nous pouvons parfois utiliser avec notre Parent Sauveur au sein de nos relations d’aide :

- « C’est normal, je suis toujours là pour vous aider, heureusement pour vous. »

- « Vous êtes fatiguée, allez hop, je prends votre sac et je vous conduis directement au centre »

- « J’ai tout arranger pour vos papiers ! Avouez quand même que si je n‘étais pas là… ! »

- Après tout ce que j’ai fait pour vous, j’aurais aimé un peu plus de reconnaissance, quand même… »

- « Ne vous inquiétez pas, je me charge de parler avec le responsable, vous risquez de dire des bêtises».

- « Ça fait quand même beaucoup de retard; mais bon, vous avez de la chance de tomber sur moi »

- « Le jour où tu décideras enfin de régler tes problèmes, tu fais comme moi, tu t’assumes »

- « Si je te le répète à chaque fois, c’est pour que tu comprennes ce qui ne vas pas chez toi ».

- « C’est bien par charité que je ne lui ai rien dit, vas ! »

- « N’hésites pas à me demander conseil, j’en ai déjà aidé plusieurs dans ton cas »

 

contrairement au Parent Persécuteur qui se reconnait assez facilement, le Surprotecteur passe par des attitudes qui peuvent passer pour de la bienveillance ; il n’hésite pas à intervenir pour « protéger », conseiller (sans qu’on lui ait demandé) ou bien influencer les personnes de son entourage. Evitant les conflits ouverts, il aime être apprécié, mais peut entrer en opposition avec le Parent Persécuteur, qui représente sa contrepartie.  

Le Parent Sauveteur, n’a rien de bienveillant, malgré certaines apparences ; On le voit à une absence d’empathie et de compassion véritable. Ce « faux » bienveillant représente une façon d’être « sympa », sans savoir qu’il répète un scénario relationnel stérile ( le « gentil », celui qui aide les autres).

 

Abordons maintenant « Le moi Enfant » autre partie de la P.A.E. (abréviation pour Parent, Adulte, Enfant). 

                                                  L’Enfant.

 

L’instance du « moi Enfant » possède elle aussi plusieurs pôles. Nous allons les détailler un par un, pour bien comprendre leurs interactions au sein de la PAE:

 

L’Enfant Libre ; cet état est caractérisé par un élan naturel ou s’exprime l’authenticité, la spontanéité, ainsi que les émotions les plus directes héritées de l’enfance, et qui perdurent toute la vie d’un individu. Le rire, les pleurs, l’abandon, la joie, la colère, bref toute la vitalité émotionnelle liée à l’enfance restent plus ou moins vivace chez la plupart des adultes et se traduit par bon nombre de nos réactions et de nos sensations. Cette partie de nous-mêmes ou le ressenti, le désir dirigent notre vie affective est primordiale.

Cette instance du Moi comble nos besoins suivants ; besoins d’affection, de liberté, de camaraderie, d’expression de soi, de partage, de créativité, d’appartenance, de joie, de reconnaissance, etc..

 Sans l’authenticité et la vie émotionnelle de notre Enfant Libre, nous mènerions une vie mécanisée, automatisée, dénuée de sensations et de spontanéité. Mais c’est également une mauvaise gestion de ces émotions qui peut perturber fortement notre équilibre psychique. Certaines situations affectives douloureuses, liées à notre passé, peuvent perdurer indéfiniment au sein de notre vie d’adulte. On comprendra donc aisément que le vécu émotionnel mal compris, mal géré, est une cause majeure de conflits et de souffrances psychique. Bien utilisée, la PAE permet entre autres de gérer les émotions liées aux diverses instances du Moi Enfant. 

Détaillons notre Enfant libre, qui s’exprime chez les « grandes personnes » de plusieurs façons. Je vous propose quelques exemples d’attitudes ou l’on reconnaît facilement ses manifestations :

 

— Une maman qui s’amuse beaucoup en jouant aux marionnettes avec sa fille,

— Un « papi » qui rit à gorge déployée en « driblant » au foot avec son petit fils,

— Une personne qui pleure spontanément face à un évènement.

— Une dame qui improvise un petit pas de danse dans son salon en apprenant une bonne nouvelle,

— Un monsieur qui tape joyeusement dans ses mains en riant tout seul, également en apprenant une bonne nouvelle

— Un jeune homme qui fait claquer ses doigts en parlant tout haut quand il a brusquement une bonne idée.

-Une jeune femme (ou jeune homme) qui utilise certaines mimiques du visage pour se faire remarquer par son entourage.

-Un monsieur qui se met spontanément en colère, suite à une contrariété,

 

Brefs, les rires, les pleurs, les colères, l’émotivité, le désir de plaire aux autres, ressentie et exprimée spontanément, font partie de cette instance. 

Nous venons de voir quelques attitudes, chez les grandes personnes, de « l’Enfant Libre », également appelé Enfant Spontané, ou Naturel.

Bien sûr, cet Enfant libre qui vit en nous s’exprime également verbalement ; il utilise un langage simple, direct, accompagné souvent de gestuelles et de mimiques du visage. Il exprime naturellement ses émotions, souvent avec justesse, car une partie de l’Enfant possède également une forte intuition (Enfant Créatif), héritée de ses années d’enfance, qu’il sait utiliser quand il s’agit de se faire comprendre par les autres. Il utilise dans ce sens toute la palette des émotions disponibles (peur, joie, tristesse, colère, etc…) … Quelques exemples :

 

- « Oh ! Chouette, tu as emmené une boîte de chocolat ! Je peux en prendre un ? »

- « Je me sens si triste depuis qu’il a changé de quartier »

- « j’ai très peur quand c’est Jacques qui dirige la maraude »

- « Je suis très irrité, après ce qui s’est passé hier au centre d’accueil »

- « J’aime bien marcher à côté de toi pendant nos sorties. »

- « Merci d’être restée, je me sens très seule depuis que je suis à la rue »

- « ça me fait vraiment plaisir que vous soyez venu apporter les repas »

- « Je suis tellement heureuse que vous y ayez pensé, je peux vous embrasser ? »

 

S’exprimer avec cette spontanéité n’est pas toujours courant ; certaines personnes ont du mal à dire leurs ressentis avec simplicité Au sein des relations d’aide, les échanges qui tendent vers cette forme d’expression sont souvent préférables au « discours » sur soi, généralement utilisé par notre « moi Parent » :

ça tombe bien finalement que tu sois restée ce week-end, vu la situation… »

On peut également exprimer ce vécu de façon ressentie, en mettant en avant la spontanéité des sentiments et des émotions :

- « Merci d’être restée ce week-end, ta présence me fait du bien ; je me sens tellement désemparée »

Autre exemple d’une phrase ou l’individu utilise son raisonnement sans exprimer son émotion :

 - « Au moment du divorce, les difficultés sont devenues grandissantes ; notre couple est entré rapidement dans une phase de conflit, je ma suis rapidement retrouvée sans logement ».

Même phrase, mais la personne utilise dans cet exemple son Enfant Libre pour s’exprimer :

« Quand j’ai dû divorcer, j’ai énormément souffert des conflits avec mon mari, je me suis sentie complètement déstabilisée quand je me suis retrouvée sans logement »

Les quelques exemples suivants vont illustrer la différence entre discours et ressenti :

- « Est-ce qu’on est toujours obligé d’accepter les visites de  cet aumônier ? » Ce discours est « l’équivalent » du ressenti suivant :

- « Je me sens très contrariée depuis que je sais que cet aumônier revient demain »

La situation est difficile dans l’entreprise ou je travaille; l’imminence de mon licenciement se précise de jour en jour », est la « traduction » du ressenti suivant :

- « Quand je vois la tournure des évènements, j’ai vraiment peur de me retrouver encore sans emploi »    

C’est une vrai satisfaction d’avoir pu tout organisé pour partir ce week - end en maraude » peut s’exprimer ainsi:

- « je suis tellement heureuse de pouvoir enfin partir ce week - end en maraude ! ».

Beaucoup de personne ont du mal à placer ces deux façons d’échanger dans leurs contextes respectifs. Soient elles se protègent, en tenant un discours sur elles même, sans être capable d’exprimer leur ressenti quand c‘est nécessaire, soit elles expriment leur ressenti très spontanément, sans tenir compte du contexte relationnel dans lesquels elles évoluent (par exemple au travail). Il y a une différence entre des relations familiales, professionnelles, amicales, hiérarchiques, etc. 

Il est donc bénéfique de savoir équilibrer ces deux formes d’expressions, suivant la situation vécue.

 

Il existe, en plus de l’Enfant Libre, une autre instance du moi Enfant :

 

L’Enfant adapté.

Comme son nom l’indique, cette partie de l’Enfant représente la partie ou la spontanéité et le naturel font place à une certaine adaptation au monde des « grandes personnes ». certains comportements enfantins devront s’adapter aux directives familiales, culturelles, sociales, etc. Nous retrouvons là l’influence du Parent Normatif, vu en amont. 

C’est l’Enfant adapté qui respecte les consignes, qui accepte de se plier au règlement, qui « s’arrête au feu rouge », qui utilise les formules de politesse et de savoir -vivre nécessaire à son adaptation sociale, etc. Il fait donc partie intégrante de notre personnalité et favorise notre capacité d’adaptation, ainsi que l’acceptation de certaines frustrations, liées à l’éducation et à l’intégration au monde des adultes : Idéalement, on pourrait représenter l’Enfant adapté de façon suivante :

 

- Il est à l’aise dans les relations qui impliquent une certaine hiérarchie, sans soumission ni rébellion

- Il réussit à s’adapter aux normes en vigueurs au sein d’une entreprise, d’un organisme, d’une église, etc..

- A l’aise dans ses relations, il est capable d’obéir sans se sentir lésé dans son autonomie,

- Il s’adapte rapidement à des cultures ou des modes de vie étrangers au siens.

 Cette instance comble nos besoins suivants : besoins d’adaptation, de reconnaissance, d’appartenance, de participation, de coopération, d’appréciation, d’acceptation, etc…  

 

Il n’est pas toujours aisé de s’adapter aussi souplement. Dans de nombreuses situations, l’Enfant Adapté développe des parties dites plus « négatives », qui s’expriment quand les exigences parentales ont été trop abusives, mal cadrées, mal exprimées, mal perçues, ou insuffisamment partagées… L’analyse transactionnelle décline les aspects négatifs de l’Enfant Adapté en deux tendances distinctes :

 

L’Enfant soumis :

 

 C’est la partie de nous-même « sur-adaptée » qui n’arrive pas vraiment à s’affirmer, surtout face à l’autorité. Souvent victime d’une influence parentale trop prégnante, elle utilise souvent le « on » au lieu du « je », s’efface devant les autres, manque d’assertivité, ne se sent pas sûr d’elle, se met régulièrement en position de soumission voire de « victime ». On retrouve les particularités de cette instance dans la position « dominé » du tandem « dominant /dominé », utilisé au sein de nos relations. Cet état du Moi Enfant est également caractérisé par sa propension à se comparer négativement à d’autres. La crainte et la tristesse font parties de ses émotions dominantes. Notre Enfant soumis vit dans l’inquiétude de l’autorité, et il se sent obligé de s’y soumettre, quelle que soit la forme sous laquelle elle se présente : Quelques phrases clefs vont nous aider à le cerner au sein de nos réactions ;

 

- « L’Aumonier m’a dit que je me trompais sur toute la ligne, qu’est-ce que je dois faire ? »

- « Oh là là, dans ce centre d’accueil, on me demande toujours des choses impossibles. »

- « tout ce travail pour la maraude, y’ a qu’à moi que ça arrive, je n’en suis pas capable »

- « Ah, il y a une erreur ? Excusez-moi, Je suis très maladroit, je n’y peux rien »,

- « Si vous me dites que c’est de ma faute , ne vous inquiétez pas, je vais me corriger, bien sûr »

- « J’ai fait ce que j‘ai pu, mais si je suis en prison, j’arriverais pas à m’en sortir  »

- « Est-ce que vous savez peut-être ce que le responsable pense de moi ? »

- « Je vous assure monsieur l’agent, je n’y peux rien, je n’avais pas vu que le parc était fermé ».

- « Après l’erreur que j’ai encore faites, je suis inquiète, qu’est-ce qu’on va me dire ? »     

- «Je suis sûr qu’ on va finalement croire que c’est de ma faute si je vis dans la rue,».

Ce role de « Victime », de l’ Enfant soumis, est souvent adopté par certaines personnes en demande d’aide, de soutien. Cela ne facilite pas toujours les choses pour les accompagnateurs, qui risquent de tomber dans une attitude de type Parent surprotecteur.

Une personnes démunie, en difficulté, de par la position de soumission qu’elle peut parfois adopter, risque d’attirer le « Parent Critique /Persécuteur » ou le Parent Surprotecteur, qui va essayer de lui suggérer fortement, jusqu’à l’imposer, sa vision des choses.

L’Enfant rebelle. Cette partie du Moi émerge dans la petite enfance pour se déployer ouvertement à l’adolescence. Il perdure à l’âge adulte dans des proportions variables selon l’individu. Comme son nom l’indique, cette instance du moi représente la partie de nous-mêmes qui réagit en s’insurgeant contre l’autorité. Face à cette dernière, l’Enfant rebelle prend systématiquement le contrepied, et n’hésite pas à transgresser les règlements. Il se révolte facilement contre l’ordre établi, « brûle les feux rouges » et dépasse certaines limites sans hésiter.

À l’entendre, on a l’impression qu’il y a toujours une espèce d’instance « supérieure » contre laquelle il faut systématiquement s’insurger ; les dirigeants, les parents, les professeurs, les gouvernements, la société, etc. Inutile de préciser que l’Enfant rebelle ne supporte pas la hiérarchie. Position typique de l’adolescence que nous véhiculons peu ou prou tout au long de notre existence face aux situations qui nous révoltent. À l’extrême, cette position peut devenir un véritable réflexe, et chez certaines personnes, l’état Enfant Rebelle (tout comme l’Enfant soumis) pose des problèmes relationnels et personnels récurrents, alors que l‘adolescence est passée depuis fort longtemps. De nombreux individus perdurent dans cette position de vie à l’âge adulte. L’agressivité (colère), l’irritabilité risque de dominer une grande partie du temps. Là aussi, je propose quelques phrases types qui le caractérisent :

 

- « Non, je viens pas, vous n’avez qu’à distribuer les repas vous-même. »

- « Je m’en fiche, c’est vous qui organisez la maraude, c’est pas mon problème. »

- « les politiciens sont tous des incapables, c’est bien de leurs fautes si je suis à la rue ! »

- «  les organisateurs ont encore décidé de nous envoyer en maraude, je m’en fous, je n’irai pas. »

- « Ils veulent changer les distributions de repas  ; on vois bien que c’est pas eu qui attendent »

- « Je me demande vraiment ce qu’ils fabriquent avec leurs couvertures , moi j’ai froid. »

- « C’est encore nul, ce repas soit disant chaud !. »

- « En tout cas, qu’ ils  ne comptent pas sur moi pour aller visiter des gens en prison. »

-« Qu’est-ce qu’on s’embête dans ce centre ; j’en ai assez de perdre mon temps, je part »

 

Cette instance du Moi tente – souvent de manière inappropriée - de combler nos besoins suivants : besoins d’indépendance, d’autonomie, d’affirmation, d’expression de soi, de liberté, etc…


l' Adulte. Mais au fait, quelle est la fonction qui permet justement de percevoir, d’observer chacune de nos instances, de les évaluer, et d’en prendre conscience ? A qui je m’adresse depuis le début de cet ouvrage, quand je parle de l’Enfant ou du Parent ? Si je suis capable de percevoir comment je me déplace de mon Enfant Libre à mon Parent normatif, si je suis capable de prendre conscience que je suis souvent dans mon Enfant Soumis face à l’autorité, ou dans mon Enfant rebelle, c’est qu’il doit bien exister une autre instance capable de « voir », d’évaluer et d’estimer les divers états du Moi que nous avons abordés jusqu’ici.

   Il s’agit en effet d’une des instances de l’appareil psychique des plus importantes, celle capable de porter la conscience que nous pouvons avoir de nous-mêmes, des autres, et du monde qui nous entoure. C’est cette instance qui nous différencierait radicalement du monde animal. 

Cet état du Moi, appelé l’état Adulte, est capable de recevoir aussi bien les informations de l’extérieur, que de son univers intime. Il trie les données, les analyses, et les mets en reliefs les unes par rapport aux autres. Il va les évaluer, les mesurer, et tempérer si nécessaire les autres fonctions du Moi. L’Adulte a la capacité de prendre du recul face aux possibilités qui s’offrent à lui. Il s’agit donc bien là de la conscience, capable entre autres de développer le processus de la pensée, de la cognition, et de la décision. Mais c’est également une conscience capable de lâcher-prise, de renoncer aux aspects infantilisants de l’Enfant, par exemple, ou de renoncer à certaines injonctions du Parent Critique, autre exemple. L’Adulte permet donc de dépasser certains clivages inhérents à la condition humaine.

Nous n’utilisons pas toujours pleinement cette fonction, ou très partiellement. Les réflexes conditionnés, et les automatismes crées par les autres instances du Moi nous emprisonnent et occultent en grande partie le potentiel qui vit à notre portée. L’Adulte est utilisé de façon minimaliste, sans que nous en exploitions toutes les ressources. Nous fonctionnons majoritairement en « pilotage automatique », sans utiliser pleinement l’éclairage de notre Adulte. Au sein de ce « pilotage réflexe » de cette inconscience automatisée, qui prend tous les droits : seul l’Adulte, au travers de prises de conscience salutaires, nous offre la possibilité de sortir de nos automatismes relationnels.  

  Le terme « Adulte » ne doit pas limiter la compréhension de cette instance à l’usage habituel que l’on fait de ce mot. Il faut comprendre le sens qui lui est donné ici sans lui octroyer une connotation parentale de type :

— le monde des « adultes (grandes personnes) »,

— C’est une « personne adulte »  

— ah, te voilà devenir enfin « adulte », etc.    

De nombreuses écoles d’A.T. soulignent l’aspect rationnel de cette instance, dès qu’elle s’exprime au sein d’un dialogue ; L’Adulte s’en tient aux faits, développe sa capacité à être à l’écoute de ce qui se passe à l’extérieur, autour de lui. Mais il également capable d’être à l’écoute de son univers interne ; les émotions, les besoins liés à son Enfant, les échelles de valeurs liées à son Parent, etc… L’Adulte synthétise toutes ces données pour se diriger efficacement au sein de l’existence, dans sa vie affective, professionnelle, relationnelle, ect… quelques types de phrases généralement évoquées :

- « J’ai réfléchi à mon emportement d’hier soir, et j’admets volontiers qu’il n’est pas justifié »

- « Si je comprends bien vous n’êtes pas d’accord avec la manière d’agir de votre collègue ? »

- « Je ne vois pas les choses de cette façon, mais j’aimerai en parler avec toi et les enfants »

-« Suite à mes remarques désobligeantes sur ta façon de voir les choses, j’aimerai te présenter mes excuses»

- « J’ai du mal à partager ton point de vue ; si tu veux on en parle ensemble, ça te va ?»

   - « Merci d’être restée, ta présence me fait du bien ; je me sens tellement désemparée depuis son décès »

-« Je me sens très contrarié quand vous évoquez ouvertement mes origines sociales ; seriez-vous d’accord pour en parler ensemble en privé ?

-« Je suis très fâché quand tu me parle des voisins, j’ai décidé de ne pas me mêler des oignons d’autrui.  »

-« mon interprétation des faits diffère de la vôtre; seriez-vous d’accord pour en parler calmement ensemble ? »

- « Je suis vraiment très contente que vous y ayez pensé, je peux vous embrasser ? »  (Adulte plus Enfant spontané)

- « Je peux à présent te proposer mon interprétation ? »

- « Quand tu me dit que je « n’y connais rien », je me sens contrarié ; j’ai besoin de respect au sein de mes relations avec toi : pourrais-tu me dire précisément ce que tu veux me dire par cette phrase : « je n’y connais rien ? »

Ces quelques exemples confirment que notre Adulte a la capacité de faire une synthèse entre ses propres valeurs éthiques (Parent normatif), son désir de rapprochement mutuel (Parent bienveillant), et son Enfant (Adapté, Libre, ou Créatif), selon les circonstances. Il nous donne la possibilité de décider quelle partie de nous-mêmes est adéquate à exprimer un vécu particulier face à un évènement. Il utilise les instances des Parents Normatif et Bienveillant, sans paternalisme ou autres manipulations. Il est capable d’être à l’écoute des émotions de son Enfant interne. Il saura vivre pleinement chaque instance, en fonction des personnes et des situations auxquelles il sera confronté. Il possède donc toutes les aptitudes à désamorcer la dynamique du triangle de Karpman.

 

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