Formation en ligne accompagnateurs bénévoles; proposées gratuitement à l’occasion du 60e anniversaire de nos formations… Voir sur notre site; www.ligueviesante.com
texte marc Klinkhamer. ( droits d'auteur protégés par la SGDL)
Beaucoup de bénévoles, qui font le choix d’apporter une aide
concrète aux personnes en difficultés, décident d’œuvrer dans l’humanitaire, l’aumônerie, etc….
Une question se pose alors :
Quel est la nature des rapports entre la personne « aidante »
et la personne « aidée » ?
Est-ce que la « bonne volonté » de la personne aidante suffira
à faire le lien entre deux univers distincts, d’un côté une personne qui vit
dans un certains « bien-être » psychique, a priori suffisamment
disponible pour aider son prochain, et, de l’autre côté, une personne qui vit
dans l’inconfort d’un certain mal être, voire au sein d’une véritable
souffrance ?
Pour clarifier leurs motivations, beaucoup de bénévoles, qui,
rappelons-le, ne sont pas toujours des professionnels de l’accompagnement, se
forment de plus en plus grâce à des outils concrets, permettant à la personne
aidée de se sentir pleinement « humaine », sur un pied d’égalité avec
la personne qui la soutient et l’accompagne.
L’écoute
active représente
le premier outil qui va nous éclairer sur les relations que l’on entretient
avec une personne en difficulté : Cette approche permet de laisser de côté nos
aprioris relationnels pour comprendre pleinement ce qui est exprimé par un
sujet qui vit un épisode difficile de son existence. L’Ecoute active peut être développée
en 5 volets principaux :
- Accueillir sans aucune forme de jugement la personne en situation
de précarité,
- développer une écoute empathique, ouverte et participative,
centrée sur la personne,
- Respecter les opinions, les croyances d’un sujet, même si elles
sont différentes des nôtres,
- Être capable de reformuler le vécu d’une personne, sans
conseiller, sans sermonner, ou autre tentative d’influence (sauf si le sujet
émet lui-même une demande de conseil, par ex…)
- développer une compréhension de la personne qui va au-delà de la
définition réductrice d’une situation décrite comme « malheureuse », « précaire
» ou autre...
La communication consciente, bienveillante et non agressante suit un protocole en 4 étapes dont
l’efficacité a déjà largement fait ses preuves en milieu scolaire, carcéral,
ecclésial, etc…,
1 : Il s’agit de remplacer
nos jugements, parti pris et autre opinions toutes faites pour s’en tenir à
l’observation de faits concrets, sans passer par nos systèmes d’interprétations
habituels.
2 : Exprimer clairement ses ressentis, ses émotions, sans
tentatives d’explications, de justifications
qui fausse l’expression authentique de nos sentiments.
3 ; formuler ses besoins, en
encourageant notre interlocuteur à exprimer les siens.
4 : exprimer une vrai demande, qui ne sera ni une exigence, ni une
manœuvre quelconque pour emmener l’autre à
penser comme nous.
Ces 4 étapes bien intégrées, un autre outil de développement relationnel
va clarifier le type de relation que j’entretiens avec une personne en
difficulté : Il s’agit de l’ Analyse Transactionnelle, qui va me permettre de bien
cerner quelle partie de ma personnalité entre en action au sein d’une relation
ce ce type.
les automatismes mis en place quand nous communiquons les uns avec
les autres sont majoritairement involontaires, et font appel à des réflexes
dont nous n’avons pas pleinement le contrôle. Dans de nombreux domaines, Nous
fonctionnons quasiment en « pilotage automatique »…
Éric Berne,
créateur de l’analyse transactionnelle, a proposé une représentation en trois
pôles, capable d’interpeller quasiment n’importe quelle personne, quels que
soit son appartenance socioculturelle et son niveau d’étude. L’analyse transactionnelle
a été créée dans le but d’aider les individus à clarifier leurs rapports
humains (leurs «transactions » relationnelles), sans passer par une méthodologie
complexe.
Voici les trois pôle, qui représentent les trois états du Moi ;
- 1), le moi Parent, - 2) le moi Adulte - 3) le moi
Enfant,
Commençons par développer le premier
des trois pôles, celui intitulé l’état « Parent » :
On utilise une majuscule pour spécifier cette instance psychique,
qu’il ne faut pas confondre avec le mot « parent », pris dans son sens commun
de « personne ayant des enfants ».
Le Parent représente l’ensemble des injonctions parentales que nous
portons en nous, ainsi que la somme des valeurs morales que nous avons
finalement faites « nôtres » tout le long de notre éducation. Celles qui ont
guidées et sculptées notre façon de percevoir le monde, ainsi que la plupart de
nos croyances et comportements…
L’état du Moi Parent est
subdivisé en deux parties distinctes : Le Parent Normatif et le Parent
Bienveillant.
Le Parent Normatif : Comme son nom l’indique, c’est la
partie de notre psychisme qui a enregistré les normes dans lesquelles nous
avons évolués durant notre enfance ; Ce cadre normatif peut être très fluctuant
suivant le type de famille, de milieu et de culture dans lequel nous avons
grandi ; Voici une liste non exhaustive des caractéristiques données par notre
Parent Normatif ;
- les valeurs morales - les codes de conduites, - les règles de vie
à respecter, - les interdits,
- les échelles de valeurs,-
les normes comportementales,- les systèmes de croyances, etc…
Les injonctions suivantes résument les expressions typiques de
notre Parent :
- tu dois écouter attentivement tes professeurs,
- il est interdit de faire ça
- la discipline est une nécessité pour vivre en société,
- Il est impératif d’obéir aux consignes, pour la sécurité de tous,
- Le respect de nos valeurs reste une priorité…
Nous utilisons cette instance du Moi entre autres pour tenter de
combler les besoins suivants : besoins de certitude, de valeurs, de stabilité,
de rigueur, de compétence, d’assurance, de règles, etc…
Le Parent Normatif décline ici les aspects caractéristiques de sa
position, ceux qui donne un cadre, des limites, et qui permettent de sécuriser
le sujet au niveau de ses valeurs et croyances. Plus ces normes seront
cohérentes, sensées, et surtout respectueuses du libre arbitre de l’individu,
mieux ce dernier saura se repérer à travers l’existence. Mais si le cadre est
trop rigide, écrasant, il risque de monopoliser toute l’énergie psychique du
sujet. Au contraire, s’il est absent, inconséquent, l’individu possédera peu de
repères pour se diriger dans l’existence. L’équilibre idéal reste donc
difficile (voir utopique) à concrétiser :
Quelques petites phrases typiques peuvent donner une idée de ce
type de messages Parentaux utilisés dans le cadre du soutien aux personnes en
difficulté:
- « Ne restez pas dans les rues du
centre ville, c’est dangereux »
- « La discipline est une valeur
primordiale quand on est en maraude. »
- « Suivez mes instructions, et
tout se passera bien dans le centre d’accueil »
- « Pense toujours à te montrer
généreuse avec les personnes en état de précarité. »
- « Respectes bien la consigne ; tu
sais qu’Il est interdit de leurs donner de l’alcool, »
- « Mettez ce manteau, avec ce
froid, c’est indispensable », etc.. etc…
Il va sans dire que les personnes trop fortement imprégnées par
cette instance du Moi adoptent parfois une position souvent qualifier de « rigide
», en direction des personnes qu’elles soutiennent. En cas, le Parent Normatif
peut prendre d’autres aspects :
Le Parent Normatif
Contrôlant (ou Parent Critique) :
Abordons maintenant les parties plus « sombres » de notre Parent
Normatif :
Il s’agit des abus d’autorité inhérents à cette fonction :
l’intimidation, la culpabilisation, la condescendance, la critique, l’emprise,
etc… que nous utilisons également pour convaincre les autres du bien fondé de
nos valeurs, croyances, et autres opinions qui nous caractérise, et que nous
aimerions voir adopter par les autres.
Les phrases types héritées
du Parent Contrôlant (Critique) sont - hélas - tellement nombreuses qu’elles
pourraient remplir des pages entières ; Quelques exemples :
- «
vos opinions erronées font preuves d’une méconnaissance totale des personnes
incarcérées ici »
- « Ces gens-là sont décidément des ignorants ; ils ne veulent rien
entendre.. »
- « Je vous ai déjà dit que vous n’arriverez à rien si vous continuer à fumer
du cannabis… »
- « Vous ne pourriez pas travailler normalement, au lieu de vivre dans
la rue ? »,
- « Décidément, on ne peut pas
compter sur toi pour faire une maraude efficace »
- « Je suis convaincu que vous vous
tromperez encore de centre d’hébergement, comme d’habitude »
- « Si vous aviez écouté mes
conseils, vous n’en seriez pas là,»
- « Tu n’en as pas encore assez, de
te comporter d’une façon aussi irresponsable avec l’alcool ? »
Le Parent Bienveillant :
nous allons aborder l’autre
aspect Parent de notre Moi ; il s’agit du Parent Bienveillant :
« Rappelle aux fidèles....
Qu'ils ne disent du mal de personne, qu'ils soient pacifiques et bienveillants,
et qu'ils fassent continuellement preuve de douceur envers tous les hommes…
». (Tite 3,2).
Appelé également Parent nourricier, il représente les aspects
protecteurs, sécurisants, du Parent. C’est lui qui offre les particularités
suivantes, indispensables pour accompagner une personne en difficulté :
- la bienveillance, -la capacité d’accueil, - la prise en charge, -l’encouragement,
-la sécurité, -l‘indulgence, - la compréhension, etc…
Les injonctions du Parent Bienveillant se reconnaissent aisément.
Quelques phrases sont proposées ici, ou l’on perçoit que les caractéristiques
de ce Parent se traduisent dans certaines formes de relations « bienveillantes
» que les adultes peuvent entretenir entre eux, bien après l’enfance:
- « n’oubliez pas que je peux m’occuper
de votre réinsertion, si nécessaire »
- « Super, je savais que ça
marcherait ! Je suis content que tu puisses enfin être hébergé »
- « tu veux que je te prépare un
bon petit-déjeuner, avec un café chaud, comme tu aimes ?
- « « Venez dans mes bras, ne soyez
pas si triste, on va trouver une solution, vous verrez. »
-« Pour l’aide alimentaire, on
y va ensemble si tu veux, c’est plus cool… ».
- « Quoi qu’il arrive, tu peux
compter sur moi après ta mise en liberté ».
- « Vous êtes fatiguée, voulez-vous
que je vous accompagne au centre d’accueil ? »
- « Pas de souci, n’en parlons
plus, c’est pardonné depuis longtemps ! »
- «N’ai pas peur, ce n’est pas bien
grave, je vais arranger ça avec la police municipale ».
- « Je te rassure, l’équipe
t’accepte comme tu es, ne t’en fait pas… »
Ce type de dynamique parentale est tout à fait positif. La
psychologie et les approches de développement personnel insistent sur l’impact
de la bienveillance dans notre vie, qui permet entre autres d’harmoniser nos
relations humaines, et d’accéder aux prémices de l’empathie.
Au-delà des paroles, l’intonation de la voix, la gestuelle, les
expressions du visage, l’attitude corporelle, le partage émotionnel, etc…sont
d’une importance majeure.
Cette instance du Moi tente de combler les besoins suivants,
principalement en direction des autres: Besoins de partage, d’empathie, de
confiance, d’intimité, de pardon, de coopération, de compréhension, de
mutualité, de sécurité relationnelle, etc…
Néanmoins, le Parent bienveillant possède lui aussi certains
aspects dits « négatifs » :
Le Parent Bienveillant
Surprotecteur ;
Vous avez peut-être
remarqué que certaines phrases mises en exemples pourraient avoir une tendance
à surprotéger l‘individu ; Le Parent Bienveillant développe un penchant à
anticiper les besoins des autres. Il peut lui aussi présenter des aspects
négatifs quand il commence à jouer ce rôle protecteur à l‘excès.: « mère poule
», « paternalisme », sont des attributs qu’on lui octroi régulièrement. On
nomme cette partie négative du Parent Bienveillant « Parent Sauveteur » ou «
Parent (sur)Protecteur ».
Contrairement à d’autres instances, ce Parent sauveteur est parfois
plus difficile à déceler, car il agit à priori avec une bonne intention, dont
il est d’ailleurs lui-même convaincu, même si on ne lui a rien demandé... Son
but inconscient vise souvent à obtenir une certaine forme de reconnaissance,
d’estime de soi (quand cette dernière est déficiente), voire de restauration
narcissique. De plus, le Surprotecteur peut rechercher la gratitude que lui
témoignent les personnes qu’il aide et qui dépendent souvent de ses
interventions. Ce qui lui apporte un sentiment de bien-être, de sécurité, et le
conforte dans son rôle.
C’est pour toutes ces raisons que nous n’hésitons pas à adopter
(même si c’est temporairement) certains automatismes liés à cette position, qui
permettent d’exprimer, d’une façon détournée, certains de nos besoins non
comblés (besoins de gratitude, de reconnaissance, d’estime de soi, etc…).
Le Parent « Sauveteur / surprotecteur » peut paraitre positif au
premier abord. La aussi, la nuance se joue parfois sur une intonation de la
voix, ou dans la formulation. Au lieu de dire et de faire les choses simplement,
le Parent Sauveteur aime à croire qu’il est toujours utile, voir indispensable.
Quitte à prendre des attitudes qui desservent finalement son entourage.
Comme son vis-à-vis le
Parent Contrôlant / Critique, notre Parent Surprotecteur a une nette tendance à
utiliser certaines formes de manipulations inconscientes :
-La
directivité, - Certaines formes d’emprise, -la dépréciation, la dévalorisation,
-La culpabilisation, le besoin de contrôler « en douceur » le vécu d’autrui,
vouloir étouffer l’initiative chez les autres,
etc…
Quelques exemples de phrases typiques que nous pouvons parfois utiliser
avec notre Parent Sauveur au sein de nos relations d’aide :
- « C’est normal, je suis toujours là pour vous
aider, heureusement pour vous. »
- « Vous êtes fatiguée, allez hop, je
prends votre sac et je vous conduis directement au centre »
- « J’ai tout arranger pour vos papiers !
Avouez quand même que si je n‘étais pas là… ! »
- Après tout ce que j’ai fait pour vous,
j’aurais aimé un peu plus de reconnaissance, quand même… »
- « Ne vous inquiétez pas, je me
charge de parler avec le responsable, vous risquez de dire des bêtises».
- « Ça fait quand même beaucoup de
retard; mais bon, vous avez de la chance de tomber sur moi »
- « Le jour où tu décideras enfin
de régler tes problèmes, tu fais comme moi, tu t’assumes »
- « Si je te le répète à chaque
fois, c’est pour que tu comprennes ce qui ne vas pas chez toi ».
- « C’est bien par charité que je
ne lui ai rien dit, vas ! »
- « N’hésites pas à me demander
conseil, j’en ai déjà aidé plusieurs dans ton cas »
contrairement au Parent Persécuteur qui se reconnait assez
facilement, le Surprotecteur passe par des attitudes qui peuvent passer pour de
la bienveillance ; il n’hésite pas à intervenir pour « protéger », conseiller
(sans qu’on lui ait demandé) ou bien influencer les personnes de son entourage.
Evitant les conflits ouverts, il aime être apprécié, mais peut entrer en
opposition avec le Parent Persécuteur, qui représente sa contrepartie.
Le Parent Sauveteur, n’a rien de bienveillant, malgré certaines
apparences ; On le voit à une absence d’empathie et de compassion véritable. Ce
« faux » bienveillant représente une façon d’être « sympa », sans savoir qu’il
répète un scénario relationnel stérile ( le « gentil », celui qui aide les
autres).
Abordons maintenant « Le moi Enfant » autre partie de la P.A.E.
(abréviation pour Parent, Adulte, Enfant).
L’Enfant.
L’instance du « moi Enfant » possède elle aussi plusieurs pôles.
Nous allons les détailler un par un, pour bien comprendre leurs interactions au
sein de la PAE:
L’Enfant Libre ; cet état est caractérisé par un
élan naturel ou s’exprime l’authenticité, la spontanéité, ainsi que les
émotions les plus directes héritées de l’enfance, et qui perdurent toute la vie
d’un individu. Le rire, les pleurs, l’abandon, la joie, la colère, bref toute
la vitalité émotionnelle liée à l’enfance restent plus ou moins vivace chez la
plupart des adultes et se traduit par bon nombre de nos réactions et de nos
sensations. Cette partie de nous-mêmes ou le ressenti, le désir dirigent notre
vie affective est primordiale.
Cette instance du Moi comble nos besoins suivants ; besoins
d’affection, de liberté, de camaraderie, d’expression de soi, de partage, de créativité,
d’appartenance, de joie, de reconnaissance, etc..
Sans l’authenticité et la
vie émotionnelle de notre Enfant Libre, nous mènerions une vie mécanisée,
automatisée, dénuée de sensations et de spontanéité. Mais c’est également une
mauvaise gestion de ces émotions qui peut perturber fortement notre équilibre
psychique. Certaines situations affectives douloureuses, liées à notre passé,
peuvent perdurer indéfiniment au sein de notre vie d’adulte. On comprendra donc
aisément que le vécu émotionnel mal compris, mal géré, est une cause majeure de
conflits et de souffrances psychique. Bien utilisée, la PAE permet entre autres
de gérer les émotions liées aux diverses instances du Moi Enfant.
Détaillons notre Enfant libre, qui s’exprime chez les « grandes personnes
» de plusieurs façons. Je vous propose quelques exemples d’attitudes ou l’on
reconnaît facilement ses manifestations :
— Une maman
qui s’amuse beaucoup en jouant aux marionnettes avec sa fille,
— Un « papi
» qui rit à gorge déployée en « driblant » au foot avec son petit fils,
— Une
personne qui pleure spontanément face à un évènement.
— Une dame
qui improvise un petit pas de danse dans son salon en apprenant une bonne
nouvelle,
— Un
monsieur qui tape joyeusement dans ses mains en riant tout seul, également en
apprenant une bonne nouvelle
— Un jeune
homme qui fait claquer ses doigts en parlant tout haut quand il a brusquement
une bonne idée.
-Une jeune femme (ou jeune homme) qui utilise certaines mimiques du
visage pour se faire remarquer par son entourage.
-Un monsieur qui se met spontanément en colère, suite à une
contrariété,
Brefs, les
rires, les pleurs, les colères, l’émotivité, le désir de plaire aux autres,
ressentie et exprimée spontanément, font partie de cette instance.
Nous venons de voir quelques attitudes, chez les grandes personnes,
de « l’Enfant Libre », également appelé Enfant Spontané, ou Naturel.
Bien sûr, cet Enfant libre qui vit en nous s’exprime également
verbalement ; il utilise un langage simple, direct, accompagné souvent de
gestuelles et de mimiques du visage. Il exprime naturellement ses émotions,
souvent avec justesse, car une partie de l’Enfant possède également une forte
intuition (Enfant Créatif), héritée de ses années d’enfance, qu’il sait
utiliser quand il s’agit de se faire comprendre par les autres. Il utilise dans
ce sens toute la palette des émotions disponibles (peur, joie, tristesse,
colère, etc…) … Quelques exemples :
- « Oh ! Chouette, tu as
emmené une boîte de chocolat ! Je peux en prendre un ? »
- « Je me sens si triste depuis
qu’il a changé de quartier »
- « j’ai très peur quand c’est
Jacques qui dirige la maraude »
- « Je suis très irrité, après ce
qui s’est passé hier au centre d’accueil »
- « J’aime bien marcher à côté de
toi pendant nos sorties. »
- « Merci d’être restée, je me sens
très seule depuis que je suis à la rue »
- « ça me fait vraiment plaisir que
vous soyez venu apporter les repas »
- « Je suis tellement heureuse que
vous y ayez pensé, je peux vous embrasser ? »
S’exprimer avec cette spontanéité n’est pas toujours courant ;
certaines personnes ont du mal à dire leurs ressentis avec simplicité Au sein
des relations d’aide, les échanges qui tendent vers cette forme d’expression
sont souvent préférables au « discours » sur soi, généralement utilisé par
notre « moi Parent » :
-« ça tombe
bien finalement que tu sois restée ce week-end, vu la situation… »
On peut également exprimer ce vécu de façon
ressentie, en mettant en avant la spontanéité des sentiments et des émotions :
-
« Merci d’être restée ce week-end, ta
présence me fait du bien ; je me sens tellement désemparée »
Autre exemple d’une phrase ou l’individu utilise son
raisonnement sans exprimer son émotion :
- « Au moment du divorce, les difficultés sont
devenues grandissantes ; notre couple est entré rapidement dans une phase de
conflit, je ma suis rapidement retrouvée sans logement ».
Même phrase, mais la personne utilise dans cet
exemple son Enfant Libre pour s’exprimer :
« Quand j’ai dû
divorcer, j’ai énormément souffert des conflits avec mon mari, je me suis
sentie complètement déstabilisée quand je me suis retrouvée sans logement »
Les quelques exemples suivants vont illustrer la
différence entre discours et ressenti :
- « Est-ce
qu’on est toujours obligé d’accepter les visites de cet aumônier ? » Ce discours est «
l’équivalent » du ressenti suivant :
- « Je me sens
très contrariée depuis que je sais que cet aumônier revient demain »
-« La situation
est difficile dans l’entreprise ou je travaille; l’imminence de mon
licenciement se précise de jour en jour », est la « traduction » du
ressenti suivant :
-
« Quand je vois la tournure des évènements,
j’ai vraiment peur de me retrouver encore sans emploi »
-« C’est une
vrai satisfaction d’avoir pu tout organisé pour partir ce week - end en maraude
» peut s’exprimer ainsi:
- « je suis
tellement heureuse de pouvoir enfin partir ce week - end en maraude ! ».
Beaucoup de personne ont du mal à placer ces deux
façons d’échanger dans leurs contextes respectifs. Soient elles se protègent,
en tenant un discours sur elles même, sans être capable d’exprimer leur
ressenti quand c‘est nécessaire, soit elles expriment leur ressenti très
spontanément, sans tenir compte du contexte relationnel dans lesquels elles
évoluent (par exemple au travail). Il y a une différence entre des relations
familiales, professionnelles, amicales, hiérarchiques, etc.
Il est donc bénéfique de savoir équilibrer ces deux
formes d’expressions, suivant la situation vécue.
Il existe, en plus de l’Enfant Libre, une autre instance du moi
Enfant :
L’Enfant
adapté.
Comme son nom l’indique, cette partie de l’Enfant représente la
partie ou la spontanéité et le naturel font place à une certaine adaptation au
monde des « grandes personnes ». certains comportements enfantins devront
s’adapter aux directives familiales, culturelles, sociales, etc. Nous
retrouvons là l’influence du Parent Normatif, vu en amont.
C’est l’Enfant adapté qui respecte les consignes, qui accepte de se
plier au règlement, qui « s’arrête au feu rouge », qui utilise les formules de
politesse et de savoir -vivre nécessaire à son adaptation sociale, etc. Il fait
donc partie intégrante de notre personnalité et favorise notre capacité
d’adaptation, ainsi que l’acceptation de certaines frustrations, liées à
l’éducation et à l’intégration au monde des adultes : Idéalement, on pourrait
représenter l’Enfant adapté de façon suivante :
- Il est à l’aise dans les relations qui impliquent une certaine
hiérarchie, sans soumission ni rébellion
- Il réussit à s’adapter aux normes en vigueurs au sein d’une
entreprise, d’un organisme, d’une église, etc..
- A l’aise dans ses relations, il est capable d’obéir sans se
sentir lésé dans son autonomie,
- Il s’adapte rapidement à des cultures ou des modes de vie
étrangers au siens.
Cette instance comble nos
besoins suivants : besoins d’adaptation, de reconnaissance, d’appartenance, de
participation, de coopération, d’appréciation, d’acceptation, etc…
Il n’est pas toujours aisé de s’adapter aussi souplement. Dans de
nombreuses situations, l’Enfant Adapté développe des parties dites plus «
négatives », qui s’expriment quand les exigences parentales ont été trop
abusives, mal cadrées, mal exprimées, mal perçues, ou insuffisamment partagées…
L’analyse transactionnelle décline les aspects négatifs de l’Enfant Adapté en
deux tendances distinctes :
L’Enfant soumis :
C’est la partie de nous-même
« sur-adaptée » qui n’arrive pas vraiment à s’affirmer, surtout face à
l’autorité. Souvent victime d’une influence parentale trop prégnante, elle
utilise souvent le « on » au lieu du « je », s’efface devant les autres, manque
d’assertivité, ne se sent pas sûr d’elle, se met régulièrement en position de
soumission voire de « victime ». On retrouve les particularités de cette
instance dans la position « dominé » du tandem « dominant /dominé », utilisé au
sein de nos relations. Cet état du Moi Enfant est également caractérisé par sa
propension à se comparer négativement à d’autres. La crainte et la tristesse
font parties de ses émotions dominantes. Notre Enfant soumis vit dans
l’inquiétude de l’autorité, et il se sent obligé de s’y soumettre, quelle que
soit la forme sous laquelle elle se présente : Quelques phrases clefs vont nous
aider à le cerner au sein de nos réactions ;
- « L’Aumonier m’a dit que je me
trompais sur toute la ligne, qu’est-ce que je dois faire ? »
- « Oh là là, dans ce centre
d’accueil, on me demande toujours des choses impossibles. »
- « tout ce travail pour la maraude,
y’ a qu’à moi que ça arrive, je n’en suis pas capable »
- « Ah, il y a une erreur ?
Excusez-moi, Je suis très maladroit, je n’y peux rien »,
- « Si vous me dites que c’est de
ma faute , ne vous inquiétez pas, je vais me corriger, bien sûr »
- « J’ai fait ce que j‘ai pu, mais si
je suis en prison, j’arriverais pas à m’en sortir »
- « Est-ce que vous savez peut-être
ce que le responsable pense de moi ? »
- « Je vous assure monsieur
l’agent, je n’y peux rien, je n’avais pas vu que le parc était fermé ».
- « Après l’erreur que j’ai encore faites,
je suis inquiète, qu’est-ce qu’on va me dire ? »
- «Je suis sûr qu’ on va finalement
croire que c’est de ma faute si je vis dans la rue,».
Ce role de « Victime », de l’ Enfant soumis, est souvent adopté par
certaines personnes en demande d’aide, de soutien. Cela ne facilite pas
toujours les choses pour les accompagnateurs, qui risquent de tomber dans une
attitude de type Parent surprotecteur.
Une personnes démunie, en difficulté, de par la position de
soumission qu’elle peut parfois adopter, risque d’attirer le « Parent Critique
/Persécuteur » ou le Parent Surprotecteur, qui va essayer de lui suggérer
fortement, jusqu’à l’imposer, sa vision des choses.
L’Enfant rebelle. Cette partie du Moi émerge dans la
petite enfance pour se déployer ouvertement à l’adolescence. Il perdure à l’âge
adulte dans des proportions variables selon l’individu. Comme son nom
l’indique, cette instance du moi représente la partie de nous-mêmes qui réagit
en s’insurgeant contre l’autorité. Face à cette dernière, l’Enfant rebelle
prend systématiquement le contrepied, et n’hésite pas à transgresser les
règlements. Il se révolte facilement contre l’ordre établi, « brûle les feux
rouges » et dépasse certaines limites sans hésiter.
À l’entendre, on a l’impression qu’il y a toujours une espèce
d’instance « supérieure » contre laquelle il faut systématiquement s’insurger ;
les dirigeants, les parents, les professeurs, les gouvernements, la société,
etc. Inutile de préciser que l’Enfant rebelle ne supporte pas la hiérarchie.
Position typique de l’adolescence que nous véhiculons peu ou prou tout au long
de notre existence face aux situations qui nous révoltent. À l’extrême, cette
position peut devenir un véritable réflexe, et chez certaines personnes, l’état
Enfant Rebelle (tout comme l’Enfant soumis) pose des problèmes relationnels et
personnels récurrents, alors que l‘adolescence est passée depuis fort
longtemps. De nombreux individus perdurent dans cette position de vie à l’âge
adulte. L’agressivité (colère), l’irritabilité risque de dominer une grande
partie du temps. Là aussi, je propose quelques phrases types qui le caractérisent
:
- « Non, je viens pas, vous n’avez qu’à distribuer les repas vous-même.
»
- « Je m’en fiche, c’est vous qui organisez la maraude, c’est pas
mon problème. »
- « les politiciens sont tous des incapables, c’est bien de leurs
fautes si je suis à la rue ! »
- « les organisateurs ont
encore décidé de nous envoyer en maraude, je m’en fous, je n’irai pas. »
- « Ils veulent changer les distributions de repas ; on vois bien que c’est pas eu qui attendent »
- « Je me demande vraiment ce qu’ils fabriquent avec leurs
couvertures , moi j’ai froid. »
- « C’est encore nul, ce repas soit disant chaud !. »
- « En tout cas, qu’ ils ne
comptent pas sur moi pour aller visiter des gens en prison. »
-« Qu’est-ce qu’on s’embête dans ce centre ; j’en ai assez de perdre
mon temps, je part »
Cette instance du Moi tente – souvent de manière inappropriée - de
combler nos besoins suivants : besoins d’indépendance, d’autonomie,
d’affirmation, d’expression de soi, de liberté, etc…
l' Adulte. Mais au fait, quelle est la fonction qui permet justement de percevoir, d’observer chacune de nos instances, de les évaluer, et d’en prendre conscience ? A qui je m’adresse depuis le début de cet ouvrage, quand je parle de l’Enfant ou du Parent ? Si je suis capable de percevoir comment je me déplace de mon Enfant Libre à mon Parent normatif, si je suis capable de prendre conscience que je suis souvent dans mon Enfant Soumis face à l’autorité, ou dans mon Enfant rebelle, c’est qu’il doit bien exister une autre instance capable de « voir », d’évaluer et d’estimer les divers états du Moi que nous avons abordés jusqu’ici.
Il s’agit en effet d’une des instances de l’appareil psychique des plus importantes, celle capable de porter la conscience que nous pouvons avoir de nous-mêmes, des autres, et du monde qui nous entoure. C’est cette instance qui nous différencierait radicalement du monde animal.
Cet état du Moi, appelé l’état Adulte, est capable de recevoir aussi bien les informations de l’extérieur, que de son univers intime. Il trie les données, les analyses, et les mets en reliefs les unes par rapport aux autres. Il va les évaluer, les mesurer, et tempérer si nécessaire les autres fonctions du Moi. L’Adulte a la capacité de prendre du recul face aux possibilités qui s’offrent à lui. Il s’agit donc bien là de la conscience, capable entre autres de développer le processus de la pensée, de la cognition, et de la décision. Mais c’est également une conscience capable de lâcher-prise, de renoncer aux aspects infantilisants de l’Enfant, par exemple, ou de renoncer à certaines injonctions du Parent Critique, autre exemple. L’Adulte permet donc de dépasser certains clivages inhérents à la condition humaine.
Nous n’utilisons
pas toujours pleinement cette fonction, ou très partiellement. Les réflexes
conditionnés, et les automatismes crées par les autres instances du Moi nous emprisonnent
et occultent en grande partie le potentiel qui vit à notre portée. L’Adulte est
utilisé de façon minimaliste, sans que nous en exploitions toutes les
ressources. Nous fonctionnons majoritairement en
« pilotage automatique », sans utiliser pleinement l’éclairage de
notre Adulte. Au sein de ce « pilotage réflexe » de cette inconscience
automatisée, qui prend tous les droits :
seul l’Adulte, au travers de prises de conscience salutaires, nous offre la
possibilité de sortir de nos automatismes relationnels.
Le terme « Adulte » ne doit pas limiter la
compréhension de cette instance à l’usage habituel que l’on fait de ce mot. Il
faut comprendre le sens qui lui est donné ici sans lui octroyer une connotation
parentale de type :
— le monde des
« adultes (grandes personnes) »,
— C’est une «
personne adulte »
— ah, te voilà devenir
enfin « adulte », etc.
De nombreuses écoles d’A.T. soulignent l’aspect rationnel de cette instance, dès qu’elle s’exprime au sein d’un dialogue ; L’Adulte s’en tient aux faits, développe sa capacité à être à l’écoute de ce qui se passe à l’extérieur, autour de lui. Mais il également capable d’être à l’écoute de son univers interne ; les émotions, les besoins liés à son Enfant, les échelles de valeurs liées à son Parent, etc… L’Adulte synthétise toutes ces données pour se diriger efficacement au sein de l’existence, dans sa vie affective, professionnelle, relationnelle, ect… quelques types de phrases généralement évoquées :
- « J’ai réfléchi à mon emportement d’hier soir, et j’admets
volontiers qu’il n’est pas justifié »
- « Si je comprends bien vous n’êtes pas d’accord avec la
manière d’agir de votre collègue ? »
- « Je ne vois pas les choses de cette façon, mais j’aimerai en parler
avec toi et les enfants »
-« Suite à mes remarques désobligeantes sur ta façon de voir les choses, j’aimerai te présenter mes excuses»
- « J’ai du mal à partager ton point de vue ; si tu veux on
en parle ensemble, ça te va ?»
- « Merci d’être restée, ta présence me fait du bien ; je me sens tellement désemparée depuis son décès »
-« Je me sens très contrarié quand vous évoquez ouvertement
mes origines sociales ; seriez-vous d’accord pour en parler ensemble en
privé ?
-« Je suis très fâché quand tu me parle des voisins, j’ai
décidé de ne pas me mêler des oignons d’autrui. »
-« mon interprétation des faits diffère de la vôtre;
seriez-vous d’accord pour en parler calmement ensemble ? »
- « Je suis vraiment très contente que vous y ayez pensé, je
peux vous embrasser ? » (Adulte plus Enfant spontané)
- « Je peux à présent te proposer mon interprétation ? »
- « Quand tu me dit que je « n’y connais rien », je me sens contrarié ; j’ai besoin de respect au sein de mes relations avec toi : pourrais-tu me dire précisément ce que tu veux me dire par cette phrase : « je n’y connais rien ? »
Ces quelques exemples confirment
que notre Adulte a la capacité de faire une synthèse entre ses propres valeurs
éthiques (Parent normatif), son désir de rapprochement mutuel (Parent
bienveillant), et son Enfant (Adapté, Libre, ou Créatif), selon les
circonstances. Il nous donne la possibilité de décider quelle partie de
nous-mêmes est adéquate à exprimer un vécu particulier face à un évènement. Il
utilise les instances des Parents Normatif et Bienveillant, sans paternalisme
ou autres manipulations. Il est capable d’être à l’écoute des émotions de son
Enfant interne. Il saura vivre pleinement chaque instance, en fonction des
personnes et des situations auxquelles il sera confronté. Il possède donc toutes
les aptitudes à désamorcer la dynamique du triangle de Karpman.
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